Il y a un an, j'avais partagé avec vous beaucoup de mes réflexions sur l’avenir, notamment mes projets à venir (voir l’article n°12). Depuis, il s’est bel et bien passé beaucoup de choses. Cet article n’est pas une rétrospective de l’année, mais une réflexion sur les derniers mois. Après avoir tourné la page de projets qui me tenaient à cœur, je me retrouve face à un vide et une transition. Entre l’épuisement des dernières créations et l’incertitude d’un nouveau départ, il s’agit de comprendre où je me situe aujourd’hui et comment je me prépare à embrasser de nouveaux horizons, tout en laissant derrière une époque qui m’a profondément marqué.

Illustration Pensées #13: Quel est mon chemin ?

Il y a d’abord eu l'officialisation de la fermeture de Wizard’s Alley. Cette décision a pris tout le monde par surprise, même nous. Mais c’était un choix difficile et inéluctable, qui s’imposait pour toute l’équipe à ce moment-là. Jean et Paul, mon tout dernier court-métrage, est enfin venu au monde (j’ai écrit un article il y a quelques jours pour vous parler des coulisses de la production). Puis, il y a quelques jours, j’ai moi-même officialisé “face caméra” mon retrait en tant que président de Berry’s Pictures. En dehors de Jean et Paul, qui est la plus joyeuse des annonces, ce sont des tournants que je n’avais pas anticipés de cette manière, mais qui étaient nécessaires pour avancer vers de nouveaux horizons… que j’évoquais il y a un an déjà et qui me paraissent encore tellement lointains.

Je crois que j’ai un peu peur, maintenant. Une peur que je n'avais pas avant de parler publiquement de l'avenir de Berry’s. 2024 s’est avérée être une nouvelle année de transition, comme une énième étape dans un long parcours. C’est épuisant, d’une manière difficile à expliquer. Les choses ont encore pris plus de temps que prévu. Il y a un an, je croyais sincèrement que cette année marquerait un tournant, le début d’un tout nouveau chapitre. Mais force est de constater que le temps semble s'étirer indéfiniment. Et pourtant, je sens bien qu’en traversant ces mois, j’ai monté une colline interminable, une pente si longue qu’elle semble sans fin. 2024 fut une année de créations, mais aussi une année marquée par l'épuisement et l'incertitude. Chaque effort m’a rapproché d’un aboutissement, mais chaque effort m’a aussi un peu plus vidé. Vidé, c’est le mot. En août, je me sentais véritablement vidé, comme jamais. Finalement, j’étais à bout de souffle après un marathon de 10 ans.

Je suis pourtant très fier des dernières créations. Ce n’est pas tant le sujet. D’un point de vue artistique, je suis totalement comblé. Jean et Paul et Le Bal des Sorciers ont été des projets marquants, je pense. D’un point de vue “retour des gens”, bien sûr. Mais je sais qu’ils m’ont pas mal épuisé.

Pour Jean et Paul, la production m’a complètement absorbé, à la fois sur le plan créatif et personnel. D’un point de vue technique, le plus difficile a été de jongler avec la charge de travail post-production après des semaines entières déjà consacrées à la production et diffusion au taff. Passer les heures de travail hebdomadaires, puis enchaîner des sessions de post-prod deux fois par semaine, c’était extrêmement épuisant. Le montage, les ajustements de son, les problèmes imprévus comme les réenregistrements de dialogues et l’utilisation de l’IA pour corriger certains passages ont demandé une grande concentration et une gestion précise de mon temps… La pression constante de gérer les priorités et les imprévus m’a laissé épuisé. Chaque tâche prenait plus de temps que prévu, et avec des ressources limitées, il fallait constamment faire des choix entre ce qui était réalisable et ce qui était nécessaire pour que le film tienne la route. Au vu de son succès sur le net, critiques et statistiques à l’appui, je ne regrette rien malgré tout.

Quant à l’aftermovie du Bal des Sorciers 2024, la captation elle-même était, une fois de plus, très très cool et je remercie encore Magical Events pour leur confiance. Même si ce n’est absolument pas le premier aftermovie que j’ai réalisé pour l’événement, j’ai vécu le montage des 25 minutes comme un tunnel sans fin. Vers la fin, j’avais l’impression de ne jamais pouvoir en sortir. Ce projet m’a vraiment isolé, laissé seul avec moi-même. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé. L’isolement que cela engendre, le fait de devoir tout gérer seul à ce moment-là, c’est ce qui a été le plus éprouvant.

L'un des plus grands défis de ce projet a été de concilier la volonté de capturer l’essence du Bal avec le besoin de me renouveler après plusieurs vidéos réalisées au fil des ans. Ce n’était pas la première fois que je filmais ce type d’événement, et il devenait de plus en plus difficile de ne pas sombrer dans la répétition. La difficulté résidait dans le fait de toujours offrir quelque chose de neuf, sans tomber dans la redite. Parfois, j’avais l’impression de m’épuiser à chercher des angles nouveaux tout en restant fidèle à notre pâte aussi. Heureusement, nous avons fait un travail de pré-production entre l’équipe de Berry’s Pictures et Magical Events qui m’a énormément aidé.

En plus de la pression créative, le défi s’est intensifié avec encore des contraintes techniques. Travailler avec trois caméras cette fois-ci (contre une seule avant), c’était un défi de montage qui m’a excité et qui m’a permis de briser la monotonie à laquelle je risquais de faire face. J’ai juste raté un détail : j’ai totalement oublié l’aspect de devoir jongler avec mon travail en journée… et que cette fois, je devais tout faire seul. J’ai dû me replonger dans les images des deux jours de captation, les revoir, les re-visionner encore et encore, en boucle, pour être certain de ne pas laisser un détail passer à la trappe. Et bien sûr, il y avait les droits d’auteur à respecter, ce qui ajoutait une pression supplémentaire : il fallait que la vidéo soit un souvenir fidèle de l’événement tout en évitant de trop faire référence à Harry Potter, pour ne pas empiéter sur lignes rouges des droits d’auteur tout en restant dans l’esprit de la communauté. Ce n’était pas une tâche facile, mais c’était un aspect essentiel du projet. Merci à Quentin qui est venu à la rescousse en fin de post-production et qui a réalisé l’étalonnage de la vidéo.

Mais il y a aussi un prix à payer. Mon corps a lâché, je ne l’ai pas écouté, et la fatigue s’est accumulée. Quand la vidéo a été publiée, j’ai mis quelques jours pour retrouver mes repères. Je m’attendais à plus d’engouement, mais il semblait qu’il y avait moins de réactions qu’à l’habitude. Les statistiques n’ont pas été très bonnes, et j’ai eu ce sentiment étrange de ne pas avoir eu beaucoup d’opportunités d’échanger avec les autres.

C’est comme si, pendant tout le montage, j’avais été dans une bulle, et une fois la vidéo sortie, elle est restée là, un peu suspendue, sans que les autres aient voulu ou su y entrer. Le moment de communion le plus beau avec les autres, c’était finalement toute l’étape de derush en direct sur Twitch, qui m’a offert un moment de respiration. Mais après la diffusion de la vidéo en elle-même, je n’avais que le sentiment que la vidéo était restée pour moi. Ce n’est pourtant pas vrai, je le sais, mais il y a ce quelque chose de difficile à expliquer. Comme si, après tout ce travail, la vidéo n’était plus qu’un projet personnel, à la fois visible et hors de portée des autres.

Malgré tout, il y a quelque chose d’addictif dans cette expérience. Le Bal des Sorciers est littéralement une sorte de drogue pour moi. J’ai cette envie de continuer, de renouveler à chaque fois ce souvenir/expérience/travail magique pour la communauté, de mettre en lumière cet événement francophone unique. Mais cette année, ce fut vraiment difficile. Avons-nous fait le tour de ce format ?

J’ai l’impression qu’en clôturant ces projets-ci, cette année 2024 a finalement été une introspection sur moi-même et comme un adieu à des projets qui me tenaient totalement à cœur. Alors que tout est bouclé et que j’ai tout officialisé, c’est un vide qui se forme en moi. Sans doute suis-je en train de me réparer, de m’autoriser à me reposer pour de vrai. Peut-être que je dis au revoir à ma vie d’adulte en début de parcours, avant de prendre de réelles responsabilités. Je sais que le bonheur que j’ai cultivé durant ces 8 dernières années prend fin et que je suis déjà nostalgique de celui-ci. Mais je sais qu’une autre forme de bonheur va arriver, à travers mon nouveau projet. Car ce projet sera dans la continuité de tout ce que j’ai entrepris. Il structura un peu mieux ma vie et me permettra un rythme de vie plus sain et moins virtuel. C’est là, la peur dont je parlais en début d’article et que je commence à ressentir : suis-je en train de faire les bons choix ? Je sais que oui, mais je n’arrive pas à quitter un bonheur qui semble cependant me détruire.

Il y a quelque chose de particulier dans cette période de transition, quelque chose de presque imperceptible, mais qui me touche à chaque étape. À force de mêler le personnel et le professionnel, on finit par se rendre compte que certaines connexions changent, parfois sans qu’on en ait réellement conscience. Les projets qui nous semblaient communs peuvent soudain paraître un peu plus solitaires, comme si chacun avait naturellement pris un chemin parallèle. Il n’y a pas de drame, juste un mouvement subtil qui se fait sentir au fil du temps. Et puis, je me retrouve là, à un moment charnière, où je me lance dans quelque chose de plus grand, plus incertain. Il y a des soutiens indéfectibles autour de moi, et pourtant, il y a aussi cette sensation étrange de se retrouver seul à avancer, même avec tout ce qui a été partagé jusqu'ici. Je me sens toujours terriblement seul, mais pourtant, je n’ai jamais été aussi lucide, et les choses n’ont jamais été aussi claires dans ma tête. De cette solitude, je me crée désormais une liberté. Une liberté de tenter quelque chose seul, rien qu’avec moi-même.

Il y a un drôle de mélange de fatigue et de nouvelles perspectives. C’est pas facile de tourner la page, mais je sais que parfois, il faut laisser partir ce qui nous est familier pour faire place à ce qui viendra ensuite.

Après la sortie de Jean et Paul, il y a à peine trois semaines, les retours ont été pleins de bienveillance. Les acteurs ont été salués pour leurs performances, l’histoire a touché beaucoup de gens, et les critiques ont apprécié l’écriture. Ces messages m’ont rappelé que, malgré mes doutes et la fatigue accumulée, ce qui a été créé avec ma formidable équipe résonne avec les autres. C’est parfois difficile à accepter, pour mon cerveau tiraillé.

Pareil pour l’annonce de mon départ en tant que président de Berry’s Pictures. Je vois bien que les gens sont tristes, parce que mon rôle dans Berry’s Pictures comptait pour eux aussi. Ça m’a frappé de voir à quel point ce projet a pris une place importante. Mais ce départ, bien que difficile, fait partie d’un nouveau chapitre. Et même si le vide est là, je sais que d’autres choses sont en train de se construire.

Début 2025, place à l'avenir. Arktefakt et Planitka Studios sont l’évolution de tout ce que j'ai accompli dans mes projets persos.

Acceptez-vous l'utilisation de cookies sur ce site ?

Nous utilisons des cookies pour améliorer votre expérience de navigation sur notre site. Certains de ces cookies sont essentiels au fonctionnement du site et ne peuvent pas être désactivés. D'autres cookies nous aident à comprendre comment vous utilisez notre site et à vous proposer du contenu pertinent.

Les cookies essentiels sont nécessaires au fonctionnement du site et ne peuvent pas être désactivés dans nos systèmes. Ils sont généralement établis en réponse à des actions que vous effectuez et qui constituent une demande de services, telles que la définition de vos préférences en matière de confidentialité, la connexion ou le remplissage de formulaires. Vous pouvez configurer votre navigateur pour bloquer ces cookies, mais certaines parties du site ne fonctionneront alors pas correctement.

Les cookies non essentiels tiers tels que YouTube, Dailymotion et Vimeo pour intégrer du contenu multimédia sur notre site. En acceptant ces cookies, vous pourrez visualiser les vidéos intégrées directement sur notre site. D'autres tels que ceux de Google Analytics, pour collecter des informations sur la manière dont vous utilisez notre site afin d'améliorer son fonctionnement et de personnaliser votre expérience. Ces cookies peuvent suivre votre comportement sur notre site et d'autres sites, ce qui nous permet de vous montrer des publicités basées sur vos intérêts. Ils peuvent également être utilisés par des fournisseurs de médias sociaux tels que Facebook ou Twitter pour vous montrer des publicités ciblées sur d'autres sites.

Vous pouvez modifier vos préférences en matière de cookies à tout moment en cliquant sur le lien "Paramètres des cookies" dans le pied de page. Pour plus d'informations sur les cookies que nous utilisons, veuillez consulter notre politique de confidentialité.